ÉDITO

La transformation de l’offre est portée par l’évolution des besoins sociaux : les attentes changent, des besoins sont insuffisamment couverts, d’autres sont nouveaux ou plus visibles. La transformation de l’offre s’inscrit dans un contexte général de changement : démographique, économique et politique.
 
Avant que survienne la crise COVID-19, l’évolution et la transformation de l’offre étaient sous-tendues par deux principes étroitement liés, l’inclusion et la désinstitutionalisation, qui se traduisaient par la volonté d’une plus grande mobilisation des ressources de droit commun et mettent en question les expertises spécialisées et les lieux où elles sont exercées. Elles l’étaient aussi par l’exigence partagée d’un parcours d’accompagnement individualisé, modulaire et global. L’offre se recomposait dans les secteurs social, médico-social et sanitaire.  
 
Ces mutations généraient déjà des interrogations multiples :
 
  • L’individualisation et la modularité des expertises pouvaient être perçues comme antinomiques du collectif professionnel qui était jusqu’à présent incarné dans l’établissement et qui est générateur d’un sentiment d’appartenance ;
  • Les identités professionnelles étaient mises en cause ;
  • L’ambition inclusive pouvait être perçue comme un prétexte à juguler les dépenses sociales ;
  • Sa traduction domiciliaire était porteuse d’un risque d’isolement des personnes accompagnées et de leurs proches aidants ;
  • L’objectif d’une société inclusive était différencié selon les publics et donc les secteurs, tout en étant difficilement critiquable ;
  • Les prises de risques inhérentes à l’accompagnement à l’autonomie mettaient en lumière le partage des responsabilités.
 
La crise COVID-19 a percuté ces mutations.
 
La pandémie a mis en lumière les vulnérabilités de notre société. Elle est le miroir déformant des inégalités socio-économiques, territoriales, d’accès aux droits et aux services publics qui en ont aggravé les effets. Ces mêmes inégalités dont on avait déjà constaté l’aggravation lors de la Journée de rentrée sociale 2019. En Ile-de-France, le vécu de la crise COVID-19 en Seine-Saint-Denis en est l’exemple le plus frappant. La pandémie a aussi généré de nouvelles fragilités consécutives au ralentissement économique et à la réduction de certaines prises en charge sociales, médico-sociales et sanitaires.
 
Après une crise, deux tendances contradictoires sont généralement observées : la tentation du retour à la normale pour conceptualiser et agir « comme avant » ; la volonté de changement considérant que la période antérieure est révolue. L’amplitude de fragilisation de la société dépendra des réponses qui seront apportées dans la durée aux besoins sociaux et économiques. Les causes et conséquences de la pandémie rendent donc indispensables la pensée des solidarités de l’après. Source de risques et d’inquiétudes majeures, la pandémie est ainsi une opportunité pour repenser le modèle social. Le réseau Uriopss-Uniopss a un rôle particulier à jouer pour nourrir la mémoire de la catastrophe, faire son histoire, et objectiver les enseignements à tirer du pendant pour l’après COVID-19. 
 
Telle est notre ambition pour cette Journée de rentrée sociale 2020 : affirmer les principes fondateurs du modèle social de demain, identifier les conditions pour actionner les quatre leviers de transformation que sont les ressources humaines, le numérique, la réglementation, les coopérations. Le partage d’expériences, des avancées et des points de vigilance, la réflexion éthique sont autant de prérequis pour définir les accompagnements dans « le monde d’après ».