Pas d’espoir, pas de future, une guerre constante faisant rage dans les périphéries.

I wanna laugh about it

But I just can't laugh about it

Alors ainsi soit-il, c’est un disque à propos d’amour et de résistance. Après la froideur discontinue de Classical Curves, Jam City revient avec un album urgent, intrépide et remarquablement sensible fait de pop songs modernes, à la fois incroyablement denses et brillamment légères. Fait avec des moyens modestes, fait par tous les moyens, les origines DYI de ce disque racontent la foi de l’artiste en le pouvoir de la musique pas seulement de transcender, mais aussi de confronter, de perturber et de suggérer une alternative à la colonisation totale de l’art par le néolibéralisme. Toujours brut, toujours dans le rouge.

Ils ont démoli les maisons, nous ont vendu d’autres rêves. Que reste-t-il ? Des kilomètres de terrains vagues, des fleurs dans les périphéries. Refrains de guitares enflés, batteries narcotiques. L’effronterie et l’imprévisibilité des futurs oubliés du post-punk sublimés dans des nuages de cordes doux et sucrés. Il ne fait aucun doute que vous êtes en train d’écouter le même artiste à l’origine de certains des titres club les plus intenses et influents de ces 5 dernières années, sur un album qui ne pouvait sortir que sur Night Slugs. Dream A Garden n’est pas en rupture totale avec le monde de Classical Curves, mais plutôt une inversion : qu’est-ce qui arrive aux gens qui se battent pour vivre et aimer sous la machinerie chromée, vide de sens et superficielle contre laquelle nous devons nous battre pour voir au-delà ?

Tout en puisant dans une histoire musicale variée (dynamique des sound systems de guitares, punk, hip-hop, country, gothique et moderne), Dream A Garden reste profondément ancré dans le caractère peu prometteur du présent : la vide tous les jours sous le régime du grand capitalisme. En changeant les avenues du style de vie que nous empruntons tous les jours en rêveries psychédéliques et surréels, Jam offre son songwriting comme un mécanisme de survie, un moyen de redistribuer un paysage dominé par les idéologies d’égoïsme et de haine. A notre époque, le fait d’aimer, d’être aimé et de donner de l’amour est radical ; Dream A Garden refuse l’avidité, la violence et les idéaux impossibles qui jubilent partout dans nos villes, infestant les espaces où les humains ont autrefois rêvé leurs propres rêves. Un rejet de notre ‘destin’ en tant que génération élevée avec des promesses en l’air, des antidépresseurs et la guerre indéfinie ; les rideaux fermés, étrangers à nos corps, nos voix, notre terre.

Chants, cris parfois à peine perceptibles, ces chansons sont incorporées avec les sons extérieurs de sirènes, publicités TV, chants d’oiseaux, tonnerre grondant et, comme Curtis Mayfield disait, « la joie d’enfants riant autour de soi ». A travers le chaos, une écriture effrontément pleine d’espoir apparaît des décombres, endommagée par la bataille mais résistante, dans un paysage où les mauvaises herbes et les bourraches reprennent possession des ruines d’un 21^ème siècle détruit.

They want us to be sad,

They want us to be selfish,

They want us to be unhappy,

So we dream a garden, its weeds quietly gatecrash this world.

Album "Dream A Garden" - sortie le 23 mars 2015